mercredi 27 mai 2015

Fleurs

Le weekend dernier, j'ai décidé de m'attaquer au vivant, mais au vivant bucolique. Oui, des fleurs. Alors balade en montagne, sur un alpage de Crans avec deux chiens qui ont un rapport de poids de 20:1. Inutile de préciser qu'il n'était pas aisé de faire des photos. J'ai tout de même testé les photos de fleurs en gros plan.

Une des règles à respecter pour photographier cette forme de vie sédentaire et colorée est de se mettre à sa hauteur, à tous les sens du terme. D'abord physiquement. Un végétal de petite taille ne devrait pas être photographié de haut. J'ai donc expérimenté "se mettre à plat ventre", "ramper", "braver les fourmis". Heureusement le soleil était de la partie.

Lorsque l'on se trouve au ras des pâquerettes, et de plus avec des fleurs en très gros plan, on tend à se projeter dans ce microcosme. On observe des insectes minuscules, des toiles d'araignées invisibles depuis la station debout. Le point de vue est totalement différent, à tel point qu'après s'être relevé, on se sent chancelant. C'est à peine si un léger vertige se manifeste.

Une centaine de photos et une heure de demie plus tard, retour au bercail et débriefing entre moi et mon appareil de photo. On ne photographie pas une fleur comme on le fait pour un portrait ou pour un paysage. Il y a beaucoup de manières de s'attaquer à la végétation. J'ai fait plusieurs essais notamment de profondeur de champ. Un choix de paramètres s'est imposé. Il est personnel, il me convient pour l'instant et se résume en quelques points:
  • Se rapprocher du sujet de manière à bien l'isoler de son environnement
  • Éviter de photographier plusieurs fleurs. Une seule suffit (sauf exceptions)
  • Utiliser appel à une grande ouverture
  •  Avoir un fond relativement uniforme et n'attirant pas le regard




 J'ai commencé avec un objectif zoom 28-300mm. Bien que pratique pour le cadrage, j'ai décidé de mettre à contribution mon 105mm 1:2,8 Macro. Un zoom est d'abord inutile puisqu'il est facile de se rapprocher ou de s'éloigner du sujet. Ensuite, généralement un zoom est moins lumineux. Enfin, un objectif macro avec un bon piqué est certainement préférable.


Une grande ouverture est indispensable si on veut obtenir une faible profondeur de champ; ce qui est mon cas. Dans une première approche j'ai testé plusieurs ouvertures, car, à des distances de trente à quarante centimètres, la profondeur de champ peut être de quelques millimètres seulement. En fonction de l'effet désiré et de l'"épaisseur" de la fleur les valeurs utilisées se situent entre f2,8 et f11 environ.


Dans beaucoup de cas, mais cela reste du domaine du subjectif, le résultat est meilleur si une partie du sujet est floue. Afin de l'illustrer, voici une première photo (un salsifis des prés) sur laquelle la fleur est quasiment entièrement nette, prise à f13:



























Voici maintenant la même photo prise à f4,5:



























Une grande majorité des gens consultés préfère la seconde version.

Pourquoi ne pas photographier des groupes de fleurs, mais les saisir de manière isolée ? Encore une fois la profondeur de champ réduite à ces courtes distances le suggère. Bien entendu, il peut être intéressant parfois d'avoir un ou plusieurs congénères flous dans le fond, ou de créer une composition originale avec plusieurs individus. J'ai décidé de me limiter à une fleur par photo.

Pourquoi un fond relativement uniforme ? Là encore, le flou de l'objectif crée un fond très diffus et estompé. Dans certains cas, il est intéressant de faire intervenir des variations de formes ou de couleurs comme toile de fond. Je n'ai pas de préférence à ce sujet.

Passons à quelques photos et commençons par des iris. Tout d'abord un gros plan, de "profil", sur lequel on distingue les zébrures des pétales, ainsi que les chaînes de barbillons:





Un pétale de face:



Une vue d'ensemble de la fleur:





Un autre spécimen, volontairement décentré:



Une dernière lampée d'iris, avec la langue pendante et un fond plus "animé":



























Poursuivons par des ancolies. Elles existent en de nombreuses couleurs. D'abord du bleu-ciel. Je les ai placées sur un même plan. Eh oui, elles sont deux:




Une autre, plus foncée:



























Une composition de profil avec un volet de chalet comme fond, d'où cette couleur ocre. A droite on pourrait croire à des chauves-souris suspendues:




Pour terminer, quelques fleurs dont je n'ai pas (plus) le nom en tête; je débute.




Sans doute un reste de fleur:



























De minuscules fleurs:



























Une robe de danseuse espagnole, avec un maximum de flou:





























mercredi 20 mai 2015

Souffleur de verre

Le 27 mars 2015 j'apprends l'existence des "journées européennes des métiers d'art". Je cherche le programme sur internet et je tombe sur un atelier de soufflage de verre qui ouvre ses portes à qui veut voir de plus près en quoi consiste le métier de souffleur de verre. Comme il fait beau, une petite balade en moto me changera les idées. A tout hasard, je prends mon appareil de photo. En réalité, ce n'est pas par hasard, car je l'ai très souvent avec moi.

Bref, je me rends à l'adresse indiquée, au Petit-Lancy, dans la périphérie de Genève. Heureusement que Joël Rey, LE souffleur de verre que je viens voir, avait fléché l'accès. Après quelques portes et couloirs, descente dans un sous-sol ressemblant à un abri antiatomique, me voilà dans l'atelier. Il faut préciser qu'en Suisse une bonne partie des activités culturelles, et plus généralement de création, se passe dans les sous-sols. Ce peuple troglodyte craignant les radiations a tiré parti de ces endroits cachés, au décor spartiate et militaire, pour créer en paix.

Du verre partout ! Du tubes en verre, des ampoules de toutes formes attendant une seule chose, qu'on les fasse fondre. Le local était envahi de jeunes enfants, curieux et fébriles à l'idée qu'ils pourront, à tour de rôle, créer un petit objet souvenir. Pendant que Joël Rey explique aux enfants comment tenir leur "morceau" de verre au-dessus de la flamme afin de créer une tête de bonhomme, un canard ou une planche à voile, je sors mon appareil de photo et je fais quelques photos.

Je dois avouer que je pensais impossible de réussir une bonne photo, sans trépied, éclairage sous forme de deux néons blafards, un attroupement d'enfants grouillant physiquement et vocalement. J'ai tout de même essayé.

Entre deux  candidats au baptême du feu, je pose des questions à Joël Rey. Quel verre utilise-t-il ? Quel est l'équipement minimal pour souffler du verre ? Faut-il une installation spéciale ? Tout un chacun peut-il en faire dans sa cave ? Pourquoi faut-il un four ? Et bien d'autres encore. Sur le moment, j'aurais pu directement commander tout le matériel nécessaire. Maintenant, j'ai un peu oublié.

J'ai tout de même retenu qu'il est préférable de disposer de trois sources de "gaz": du gaz de ville, de l'oxygène (mélangé en plus ou moins grande quantité au gaz de ville pour obtenir une flamme plus homogène) et de l'air comprimé afin de donner plus de souffle à la flamme. Le chalumeau permet de régler la quantité de chacun de ces composants.

Le verre utilisé est du verre borosilicate, qui supporte de hautes températures. Il existe une grande variétés de matériel pour souffler du verre, mais il suffit d'un local sans équipement spécial. Un four est indispensable pour recuire les objets créés. Son prix n'est pas négligeable et augmente proportionnellement à ses dimensions (logique!).

Joël Rey était, au départ, souffleur de verre dans la fabrication d''instruments scientifiques de verrerie: ampoules, serpentins, etc. Il s'est ensuite orienté vers un travail plus artistique. Il expose régulièrement ses œuvres et on peut en avoir un aperçu sur son site (au nom enviable) www.verre.ch.
Je lui ai envoyé les quelques photos que j'ai faites dans son atelier. L'une d'entre elles se trouve sur son site. J'ai promis de retourner le voir avec un peu plus de temps à disposition, afin de poser encore quelques questions et dans l'espoir de faire des photos plus abouties.

Voici d'abord des photos avec une flamme à forte pression:



























La photo suivante montre plus en détail la flamme:




























Une vue de la flamme et du verre chauffé:




























Les reflets des couleurs et des formes dans le verre sont fascinants de limpidité:




Sur cette photo, la pression est beaucoup plus basse et la flamme s'enroule littéralement autour du verre:


























J'espère retourner bientôt dans cet atelier et faire d'autres photos, plus variés.



mardi 12 mai 2015

Photos insolites

Parmi toutes les photos qu'un photographe capte, certaines sont étonnantes, le plus souvent de manière involontaire. Pour ma part, j'en ai exhumé quelques-unes, parfois des tréfonds du passé.

La première date approximativement de 1974. Elle se passe dans la banlieue de Milan, lors d'une fête organisée par monsieur et madame Ferrari (madame est à gauche). Un invité ouvre une bouteille de champagne. Je n'ai pas le choix, flash automatique. Et voilà, mousse figée, ainsi que la grimace de Gianni. Les Ferrari étaient de riches industriels du nord de l'Italie, mais néanmoins très généreux et sympathiques. Pour l'époque, les moyens qu'ils attribuaient aux préparatifs de leurs réceptions m'impressionnaient. Comment me suis-je retrouvé là ? Mystère.





























La photo suivante, est purement le fruit du hasard. Le 10 novembre 2013 je me promène au bord du Léman. Le temps est maussade. Je suis un groupe de mouettes en vol et je déclenche. La photo est mauvaise. Mais, de retour à la maison, en zoomant quelque peu j'ai remarqué un jet qui sort de l'arrière de la mouette. Immédiatement une phrase m'est venue:

"Les mouettes aussi peuvent manger et pisser"

Sans un D800, je n'aurais certainement jamais remarqué ce détail.





























En décembre 2014, c'est une cheminée qui m'intrigue. Sur le moment, c'est uniquement la composition avec la fenêtre et la cheminée qui m'attire. Après coup, j'ai bien dû admettre que j'ai photographié un petit bonhomme Duplo.




En octobre 2011, en visite chez une amie à Padoue, je tombe sur cet alignement de scooters, dont un seul n'est pas noir. J'ai donc intitulé cette image "Provocation".
















Pour revenir aux mouettes, voici ce que je découvre dans la rade de Genève, le 24 décembre 2012. Evidemment le titre est "Anticonformiste".






























Au marché de Sion, en avril 2014, j'ai pris une série de photos à l'aveugle, dont celle-ci. J'ai moi-même mis un moment pour comprendre ce que j'avais réellement photographié. 
































Je reviendrai certainement bientôt avec d'autres photos insolites.


Reflets (2)

Pour cette deuxième partie consacrée aux reflets, nous partons vers des lacs du canton du Valais. Cette région comporte des lacs de plaine et un grand nombre de lacs d'altitude. Pour commencer, nous nous dirigeons vers le lac du Louché, retenue d'eau créée il y a certainement plus d'un siècle dans le petit village de Lens. A ne pas confondre avec un autre lac du Louché, également valaisan, mais situé dans le val d'Hérens.

C'est au bord du lac du Louché que s'est construite dès 2010 la Fondation Pierre Arnaud. Elle se situe au bord du lac et sa façade principale est entièrement constituée de panneaux solaires semi-transparents, intégrant des jeux de lumières. C'est probablement une des seules formes d'architecture moderne qui ne gâche pas le paysage. Cet immense miroir réfléchit des images diverses, en fonction des saisons et des heures de la journée.

Je me suis, bien sûr, intéressé aux reflets de cette paroi vitrée dans l'eau du lac dès la construction de l'édifice. La première photo représente les colonnades de panneaux qui donnent chacune une teinte différente de ses voisines. Comme on l'aura compris, il s'agit en fait d'une double réflexion. On y voit le reflet dans l'eau de la paroi du bâtiment qui, elle-même, donne l'image des espaces et constructions situés en face. C'est en quelque sort une manière indirecte de représenter le décor qui se trouve dos au photographe. La largeur du champ couvert par la photo est de trente à quarante mètres.











En voici un détail qui, pivoté de 90 degrés, donne une tout autre interprétation. Strates minérales ou visualisation d'un signal électronique ?

























Toujours autour de ce lac, en cherchant un peu, on trouve des reflets plus détaillés, comme ces flammes horizontales.





























La photo suivante a été prise au bord du lac des Miriouges, situé en dessous de Crans, à 1333 mètres d'altitude. Il s'agit également d'une réserve d'eau destinée à l'irrigation des champs. C'est une de mes préférées. Les couleurs m'ont d'abord attiré, puis les formes improbables. Ce n'est qu'après un moment que j'ai aperçu de la végétation, sortes de feuilles d'algues vue en transparence. Comme je l'ai déjà dit, le fait d'avoir sur la même photo une image réfléchie et une image en transparence est une caractéristique intéressante de cette technique. Cette photo remonte à 2013 et, sans GPS ou notes manuscrites, il ne m'est plus possible de dire quel était l'objet reflété.


























Lunette 2D



vendredi 8 mai 2015

La petite maison

Le jeudi premier janvier 2015 était sans doute un bon jour. Lendemain de fête.

En Valais, du côté de Lens, entre Sierre et Crans, il fait toujours bon se promener. On y découvre mille sujets intéressants; moments propices pour la photographie. C'était important de bien commencer l'année. Nous sommes partis vers dix heures, ma femme, moi et notre fidèle et infatigable quadrupède, pour une balade le long d'un des multiples bisses qui sillonnent la région, et tout le canton d'ailleurs.

Les promenades le long des bisses offrent plusieurs avantages. Le premier, non négligeable pour moi, est que le sentier qui borde ces "mini cours d'eau forcés" est en pente douce, écoulement oblige. Par moment on se demande même si on monte ou si on descend. Ce jour-là, ce sera le Grand Bisse de Lens. Appelé ainsi parce qu'il contourne le mont Châtelard et donc la petite commune de Lens. Sa longueur atteint environ 14 kilomètres, mais nous en parcourons habituellement seulement une petite longueur, car dans sa partie supérieure, certains passages effraient quelque peu notre intrépide labrador. L'autre avantage la concerne justement; cette peluche noire à quatre pattes adore l'eau et marche dedans la plupart du temps. Enfin, les arbres qui bordent le chemin, le plus souvent des conifères, protègent des grosses chaleurs estivales et dans une moindre mesure des chutes de neige durant l'hiver.

Une multitude d'espèces, végétales et animales, se partagent le territoire. Mais en ce froid jeudi de janvier, les sujets d'intérêt pour un photographe restent la neige et les paysages.
Partis en fin de matinée de Lens, nous allons remonter le long du bisse. Nous arrivons après deux ou trois kilomètres, à l'endroit où il fait un coude, et remonte dans la vallée de la Lienne. De là, on a une vue exceptionnelle de la vallée du Rhône. Sur la gauche (vers l'est) on peut apercevoir les grandes antennes paraboliques de Loèche. Sur la droite, on peut suivre le Rhône du regard, de Sierre à Martigny, en passant par Sion.

Nous sommes montés de quelques centaines de mètres au-dessus de ce point d'observation pour arriver sur une arrête depuis laquelle mon regard a tout de suite été attiré, au loin, par des vignes enneigées. En observant mieux, j'ai aperçu une toute petite maison jaune orange qui paraissait perdue au milieu d'un décor très géométrique. Probablement une maison de vigneron. 

Il était 12h30, la maison se trouvait à deux kilomètres à vol d'oiseau. Recherche d'une trouée dans les branchages, zoom au maximum et déclenchement. A l'œil nu, on pouvait voir la maison, mais de manière imprécise. C'est seulement en visionnant la photo, une fois rentré au chalet, que je l'ai examinée plus en détail. Étonnante petite maison, semblant tombée du ciel dans ce quadrillage improbable.

Voici cette photo, qui a été classée première de la catégorie "Paysages" au concours annuel de la SGP (Société Genevoise de Photographie) en février 2015.














La petite maison

Afin de situer un peu mieux l'endroit, voici une vue de la région. On y voit, en haut à gauche, une marque indiquant la position de la maison, ainsi que l'endroit de la prise de vue.











Plan de situation


Pour terminer l'histoire de la petite maison, voici un lien vers une émission de radio qui parle du Grand Bisse de Lens.




jeudi 7 mai 2015

Reflets (1)

L'idée de faire des photos de reflets dans l'eau m'est venue en juillet 2012, après avoir passé quelques jours au festival d'Avignon. Trois jours en Ardèche, au calme, au bord d'une rivière m'ont laissé le temps d'observer. Et l'observation génère souvent une multitude d'idées intéressantes. Dans mon cas, ce fut de constater que l'eau peut être regardée de diverses manières. On peut y voir simplement de l'eau; au mieux examiner son contenu ou le fond. Dans ce cas, notre œil se "focalise" sur ce qu'il voit, ou a l'habitude de voir, c'est-à-dire le plus souvent la surface du liquide. Le reste, en particulier les reflets, reste flou.

Je ne sais par quel hasard, probablement à cause de la falaise qui trônait sur l'autre rive, mon regard s'est mis à utiliser la surface du liquide comme miroir. Dès lors, tout change. Tout est inversé, bien sûr. Mais tout est différent. Les couleurs ne sont plus tout à fait fidèles à la réalité. Et surtout, l'image est tributaire de l'état de surface de l'eau. Un nageur, un caillou lancé, ou simplement le vent peuvent modifier d'une manière très riche et variée la perception de l'environnement réfléchi.

A mon retour, je suis allé au bord du Léman, dans la rade de Genève, afin d'essayer de capturer au mieux ces fameux reflets. Techniquement, cela demande quelques procédures et réglages particuliers. Les premiers essais furent, comme souvent, si ce n'est désastreux, du moins totalement ternes et inintéressants. La persévérance étant souvent le moteur du progrès, après quelques escapades dans les divers ports du Léman (Versoix, Port Choiseul,…), ainsi qu'au bord de plusieurs lacs du Valais, le technique s'affine.


Pourquoi donc s'intéresser aux reflets ?

Parmi tous les sujets possibles en photographie, je cherchais une manière d'approcher un résultat artistique. Non pas dans le sens d'une œuvre d'art, ce qui pourrait paraître prétentieux, mais dans le sens de retranscrire une émotion ou de provoquer une réaction, quelle qu'elle soit.

Mes photos de reflets sont rarement figuratives. C'est plus le côté abstrait qui m'attire, en donnant une grande importance aux couleurs, aux formes et aux textures. Il faut dire également qu'à notre époque la plupart des photographes sont exaspérés par les dérives du droit à l'image et aux problèmes annexes qu'il soulève. Quasiment tout ce qu'on peut photographier en extérieur est susceptible de générer contestation, oppositions, etc. Que ce soit des personnes, des animaux, des lieux. La loi et les diverses jurisprudences sont très complexes et peuvent varier de pays en pays, voire de ville en ville pour un même pays.

Au moins, en photographiant l'eau, le ciel, le feu, les animaux sauvages le risque est réduit. Cela semble anodin, mais c'est une réelle préoccupation dans le monde de la photo. 

Bref, revenons aux reflets. Les reflets aquatiques demandent quelques adaptations au photographe.

Quand

La meilleure qualité est obtenue durant la saison froide, avec une atmosphère claire et limpide, si possible avec un soleil rasant, c'est-à-dire tôt le matin ou tard le soir. Heureusement les notions de tôt ou tard, durant l'hiver, correspondent à des heures "civilisées".

Comment

La physique, et l'optique en particulier, nous enseigne que la réflexion sur une surface transparente est d'autant plus importante que l'angle d'observation est faible. Il faut donc photographier en réduisant l'angle entre la ligne de visée et le sol. Je dirais moins de 30 degrés, si possible.

Problèmes techniques

Dans une photo de reflet aquatique, on garde le plus souvent une petite partie de la surface de photographiée (cropping, plus que simple recadrage). Il faut donc disposer d'une bonne résolution native. Ensuite, il vaut mieux utiliser un objectif à longue focale. J'utilise un Nikkor AF-S 28-300mm monté sur un Nikon D800. La raison du zoom tient en partie à la difficulté de s'approcher de l'eau. Beaucoup de mes photos sont prises depuis des jetées où sont amarrés les bateaux. Il faut donc souvent effectuer un recadrage qui évite les enchevêtrements de cordes, ancres et tuyaux de toutes sortes. Pour des prises de vues à plus grande distance il est important d'avoir une grande profondeur de champ. Je dirais même une profondeur de champ maximale, étant donné que l'objet photographié est quasiment dans le prolongement de la ligne de visée.

Les poussières et tout autre petit objet flottant sont gênants. Je les supprime donc manu militari en post-traitement.

Problèmes philosophiques

L'eau bouge, et c'est là tout le problème. Deux photos de reflet faites à un dixième de seconde d'intervalle seront totalement différentes; si ce n'est les couleurs, du moins les formes.

J'ai oublié de le préciser, tellement cela me semble évident, mais photographier la réflexion d'un objet ou d'un paysage à la surface d'une eau parfaitement plate ne présente, à mon sens, absolument aucun intérêt. Le résultat est donc dépendant des conditions extérieures, de tout ce qui peut perturber l'état de surface du liquide; essentiellement le vent. Non seulement son absence ou sa trop grande force rendent le sujet inexploitable, mais ses variations peuvent fournir des résultats très différents.
Je pense que la question philosophique commence à se dessiner. Qu'est-ce qui caractérise une photo esthétiquement réussie d'une qui l'est moins ? Le hasard. Et c'est là que le bât blesse. Généralement hasard et réussite ne font pas bon ménage. De plus, avec des appareils permettant facilement de prendre des photos en rafale, pourquoi ne pas prendre dix ou vingt photos et choisir la meilleure ? Beaucoup de photographes le font, alors pourquoi pas ?

J'ai essayé et j'ai arrêté. Je dois dire, moins pour des considérations philosophiques que pour des problèmes pratiques. Comme il faut parfois extraire une petite portion d'image et la traiter un minimum, le procédé devient long et fastidieux. Bien entendu il m'arriver de faire trois ou quatre photos d'un reflet intéressant, mais jamais systématiquement et jamais en rafale.

J'assume donc le choix limité, le hasard, mais je me concentre sur le sujet, le cadrage, le traitement et l'atmosphère qui peut se dégager.


Titres

Dans les photos abstraites, le choix des titres prend, à mon sens, une grande importance, surtout si la photo est montrée en public. Un titre, choisi par l'auteur, aide le spectateur à comprendre la représentation abstraite. Parfois il cherche, parfois il abandonne, parfois il y voit tout autre chose que le photographe. Lorsqu'il voit le titre, il essaie de trouver, de comprendre et souvent le déclic se fait. 

Ayant fait un livre photo intitulé "Reflets aquatiques" en accompagnement d'une exposition en octobre 2014, je me suis posé une question fondamentale concernant le titre d'une photo abstraite: faut-il qu'il soit immédiatement visible, ou bien le spectateur doit-il le découvrir après coup, s'il le désire ? Je n'ai pas la réponse. Certaines personnes m'ont dit que voir le titre court-circuite leur imagination et les mène trop vite vers la vision de l'auteur. Ce qui m'a fait penser à spécifier uniquement un numéro sur chaque photo, le titre n'apparaissant que dans la table des matières.

Cependant, d'autre personnes préfèrent voir le titre tout de suite et essayer de trouver ce qui justifie son choix. Elles prennent l'exercice comme un défi. Je suis donc conforté dans l'idée qu'un titre est plus que jamais indispensable,mais je suis encore indécis sur le fait de le spécifier d'emblée.


Précisions

Il convient de préciser que ces photos de reflets aquatiques ne sont pas modifiées, si ce n'est un recadrage et parfois une augmentation du contraste ou de la saturation. L'image en elle-même n'est pas autrement altérée. N'importe qui peut s'en convaincre en allant se balader au bord de l'eau, en se mettant accroupi et en observant non pas la surface de l'eau, mais les reflets qu'elle génère. Après l'avoir constaté une première fois, on ne voit plus une surface liquide de la même manière. Si vous ne voulez pas prendre ce risque, ne faites jamais ce que je viens d'indiquer.


Exemples

(N'hésitez pas à cliquer sur les photos, afin de les voir en plus grand)

Une de mes premières séries de photos de reflets a été prise à Versoix, plus exactement à Port Choiseul, fin juillet 2012, en fin d'après-midi par un soleil éclatant. Ce petit port, à la sortie de la localité, abrite des bateaux de plaisance, essentiellement des voiliers. Lorsqu'il fait beau, l'activité y est intense. L'avantage de photographier en hiver est le calme quasi absolu et l'absence de perturbations humaines de la surface de l'eau.

Voici d'abord des mâts de bateaux. L'image a été tournée de 90 degrés vers la gauche. Elle peut faire penser à des traces de peinture ou à des strates veinées dans de la roche. On comprend l'importance du mouvement de l'eau, ici de faible amplitude. On voit également l'utilité d'une grande profondeur de champ, une quinzaine de mètres dans le cas présent.


























Sans titre


Voici une photo prise au même endroit, dans des conditions semblables, mais avec un éclairage différent, notamment un ciel bleu. On se rend bien compte de l'importance du mouvement de l'eau, dont l'influence sur le résultat final est aussi grande que le choix du sujet lui-même. Elle me fait penser aux tracés sur oscilloscopes ou autres appareils hospitaliers de contrôle ou de réanimation, d'où le titre.



























Mort clinique



La prochaine photo a été prise dans la rade de Genève. Ce qui m'intéresse est le contraste entre le calme des reflets du ciel et les lignes fortes donnant l'impression d'un profil de femme. Quelques personnes pensaient que j'avais simplement ajouté des traits noirs, alors qu'il n'en est rien.


















L'inconnue des ondes



Une photo dans le même genre, prise le même jour, mais avec des conditions de vent différentes. On devine une légère brise tremblotante, générant des vaguelettes plus tortueuses, pouvant faire penser à des dessins rupestres sur les parois d'une grotte.




























Sans titre


Un reflet de voile multicolore m'a tout de suite fait penser à un chien, au centre, avec l'oeil, l'oreille et la truffe. Ce qui m'a intéressé est le contraste entre le sujet coloré et finement ciselé, et le fond plus doux et flou. C'est un exemple typique d'image qui ne peut être obtenue autrement que par réflexion.



























Chien éparpillé






Voici un autre exemple d'effet observable à la surface de l'eau. Comme un moiré. J'avoue que je ne me souviens plus quel objet est ainsi réfléchi. Une voile certainement, la variété n'est pas immense dans un port. Là encore, ce qui m'intéresse est la texture et le "dessin" obtenu.







Marée moirée

Pour terminer cette première série de reflets, voici une première photo assez banale en apparence, jusqu'au moment où certains y découvrent une sorte de bonhomme de neige tout blanc, avec son bonnet et la large bouche ouverte. Moi, j'y ai vu une femme aux cheveux mauves, la cigarette au bec, au-dessus d'un petit menton et d'un cou fuyant.


















Femme à la cigarette


Et une seconde image qui met en évidence les deux façons qu'a la lumière de parvenir à nos yeux. Par transparence et par réflexion. La partie blanche ainsi que le "filet" sont un reflet, alors que le fond bleu et les poutres entrecroisées sont réellement au fond de l'eau. Selon l'angle de prise de vue, on peut jouer sur les deux aspects, par exemple en privilégier un.










Mosaïque

Ceci termine cette première présentation de photos de reflets.

mercredi 6 mai 2015

Pourquoi la photo ?

A l'âge de cinq ou six ans j'étais fasciné par un appareil de photo avec soufflet repliable; plus par la mécanique que par la photographie, puisque personne ne l'utilisait à la maison, me semble-t-il. Il ressemblait un peu à celui-ci:


Est ensuite venue la phase incontournable du Kodak Instamatic, quasi cubique. Impossible de faire plus simple. Un levier pour avancer le film, un bouton pour le déclenchement, et un petit bouton devant pour éjecter le "tiroir" du flash avec son "ampoule" bleue" qui devenait presque molle après avoir été allumée. Le voici:



Plusieurs années plus tard, probablement vers 1972, l'envie de faire de meilleures photos (eh oui ! déjà l'impression que le matériel était pour beaucoup dans une bonne photo) me poussa vers un reflex du genre de celui-ci:



Malheureusement, le nom seul provoquait la risée des copains. Je suis alors assez vite passé au Canon FTb, en 1974. Une valeur sûre, puisqu'à l'époque il équipait les premiers radars routiers automatiques.





Je me suis offert un téléobjectif 200 mm et j'ai commencé à faire plus de photos.

Quelques années plus tard ce fut un Canon AE-1. Belle bête; comme le dit Wikipedia: appareil bénéficiant d'une cellule analogique intégrée et de l'exposition automatique, d'où son nom. Je le trouve toujours esthétiquement très réussi, un peu plus arrondi et ergonomique:



Ayant délaissé quelque peu la photo, c'est seulement en 1996 que j'ai fait l'acquisition d'un Canon EOS5000. Un peu léger je l'avoue; je devais manquer de moyens à l'époque:


Durant cette époque argentique, je n'ai pas hésité à faire beaucoup de photos. Des milliers. Je m'en félicite actuellement. D'une part, il n'était pas évident de déclencher à tout va, car la pellicule et le développement coûtait cher, et c'était incontournable. D'autre part, je retrouve des souvenirs; et les souvenirs, eh bien, c'est des souvenirs.

L'arrivée du numérique et surtout le fait d'y adhérer aussitôt a été une erreur. Une régression totale durant quelques années, le temps d'user quelques compacts Fuji, Canon et autres. Ayant profondément réfléchi et après avoir compris que la photo, la vraie, pouvait avantageusement passer de l'argentique au numérique, mais pas au travers de ces sous-objets technologiques de qualité anachronique pour une époque moderne.

Retour donc au bon vieux reflex, mais étonnamment Nikon et non plus Canon. Je suis passé successivement par les modèles suivants, pour lesquels il est inutile de publier les photos:
  • D90
  • D5100
  • D600
  • D800
  • D810
Un reflex, c'est bien, mais c'est lourd.
Un Leica, c'est bien, mais c'est cher.

Moralité, j'ai aussi acheté un Fuji X100s dont je suis très content. Retour aux fondamentaux: objectif fixe, focale fixe, mais une sacrée qualité. Actuellement je l'utilise en alternance avec mon D810. Les deux me sont utiles, mais bien sûr pas dans les mêmes conditions ni dans les mêmes buts.